Les stocks dans la supply chain

1. Principe de Forrester

Le Beer Game, un classique des jeux de simulation en management de la chaîne logistique a été inventé dans les années 1960 par Jay Forrester au MIT, avec comme objectif initial d'étudier l'effet de la structure des systèmes sur le comportement des décideurs.

Le jeu a depuis connu d'autres applications dont la plus connue est celle qui consiste à mettre en évidence l'effet coup de fouet, ou phénomène de variabilité croissante de la demande dans les chaînes logistiques.

Le Beer Game permet de mettre en évidence trois phénomènes illustrés ci-après.

Lorsque le client commande une quantité supérieure à d'habitude, pour éviter toute rupture de stock à l'avenir, les prochains maillons de la supply chain réagiront de telle manière à provoquer irrémédiablement une oscillation au niveau de la quantité commandée.

Et plus on s'éloigne de l'événement source, plus chaque maillon de la chaîne réagit :

2. Management du réseau logistique

2.a. Éviter le "Bullwhip Effect"

graphique illustrant le bullwhip effect

Les stocks coûtent, mais aident à assurer le service client.

Les délais créent l'inertie tout comme les chaînes logistiques longues.

Nécessité d'un système d'informations pour coordonner chaque étage de la chaîne.

Nécessité d'une coopération dans le réseau.

3. D.R.P. : planification des ressources de distribution

D.R.P.
Distribution Resource Planning : En français planification des ressources de distribution, est un processus de gestion en cascade qui détermine les besoins des localisations de stocks qui garantit que les sources d'approvisionnement pourront répondre à la demande

3.a. Livraison planifiée des dépôts

graphique illustrant le principe de la DRP

Le concept de DRP, a été inventé par André J. MARTIN dans les années 80.

Système classique de gestion de stock dans les réseaux de distribution

Partant du constat que dans de nombreuses entreprises disposant d'entrepôts primaires qui servent un réseau d'entrepôts secondaires, ce sont ces derniers qui décident quoi, combien et à quelle fréquence commander aux entrepôts primaires.

Les limites de ce mode d'approvisionnement sont assez évidentes. Dans une situation de pénurie, cela peut conduire à reconstituer un stock tandis qu'un client d'un autre entrepôt est en rupture.

La DRP repose sur l'utilisation de nomenclatures de distribution qui modélisent le réseau logistique en interconnectant entrepôts primaires et secondaires. Tout comme le MRP utilise les nomenclatures de production pour calculer les besoins en composants, la DRP utilise des nomenclatures de distribution pour propager la demande des entrepôts secondaires aux entrepôts primaires.

Dans la pratique, le calcul DRP prend en compte les besoins fermes et prévisionnels de chaque marché, calcule les besoins nets à chaque niveau du réseau, consolide ces besoins, et les positionne à la bonne période en tenant compte des délais d'approvisionnement.

C'est ce besoin net consolidé que les entrepôts primaires doivent servir à partir de leur stock. La DRP s'achève par le déploiement, c'est-à-dire la répartition du stock central vers les stocks locaux. En cas de pénurie, le DRP permet de remonter à l'origine du besoin et facilite les arbitrages. Des règles de répartition équitable peuvent également être utilisées.

L'invention du MRP au cours des années 60, a révolutionné la gestion industrielle : depuis lors, les besoins en composants ne sont plus considérés comme des besoins indépendants, mais comme des besoins dépendants issus des besoins des articles niveau supérieur. La DRP revient à considérer les besoins des entrepôts primaires non plus comme des besoins indépendants, mais comme des besoins dépendants, issus des besoins des entrepôts secondaires.

Elle permet l'extension de la Supply Chain vers l'aval, que l'entreprise soit propriétaire ou non de son réseau de distribution.

En d'autre termes, la DRP est un processus de planification qui permet de définir certains paramètres de contrôle du niveau de stocks, notamment un stock de sécurité, et de calculer les besoins en stocks échelonnés dans le temps en fonction des prévisions de ventes et des commandes.

Ce procédé intègre plusieurs variables tels que :

Pour un fonctionnement optimal, le processus de Distribution Resource Planning nécessite de rassembler différentes données input, telles que :

Exercice de planification des besoins de distribution : exercice de planification des besoins de distribution Correction : corrigé de l'exercice de planification des besoins de distribution

3.b. Cas d'une vente promotionnelle

Dépôt Périodes
SS=10 d= 1période Q=25 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Besoins prévisionnels 25 25 25 25 50 50 35 35 15 15
En transit 25
Disponible prévisionnel 35
Livraisons prévisionnelles
Packaging Périodes
SS=10 d= 1période Q=lot pour lot
Capacité : 40 unités/période
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Besoins bruts
Réceptions prévues
Disponible prévisionnel 0
Ordres prévisionnels
Ordres fermes

3.c. Niveau de service et stock de sécurité

Courbe montrant la correlation entre le niveau de service et le stock de sécurité

3.d. Relation entre stock de sécurité et nombre de dépôt

Le stock de sécurité (SS) pour chaque centre de distribution se calcule de la manière suivante :

Stock de sécurité pour chaque centre =
Stock de sécurité pour
UN centre de distribution
/ Nombre de centres de distribution

Prenons l'exemple suivant : Une entreprise garde 500 unités d'un produit fini en stock de sécurité dans son unique centre de distribution, vu la croissance du marché, elle décide de construire 3 centres de distribution.

Stock de sécurité nécessaire dans chaque centre :

SS chaque centre =
500 / 4
= 250

Stock de sécurité total :

SS chaque centre = 250 x 4 = 1 000

Autre exemple : Une entreprise à un stock de produits finis d'une valeur de 30 600 000 euros dont 600 000 euros de stock de sécurité. Ces stocks sont répartis dans 9 dépôts. La société décide de construire 16 dépôts supplémentaires :

Nouveau stock de sécurité par dépôt :

SS comme s'il y avait un unique dépôt =
600 000 / 9
= 200 000

Nouveau stock de sécurité total :

Si 25 dépôts, alors SS par dépôt =
600 000 / 25
= 40 000

Nouveau stock total = 40 000 x 25 = 1 000 000

3.e. Flowcasting

Le concept de flowcasting a été également inventé par André J. MARTIN.

D'un côté, les contraintes que les acteurs de la Supplychain (approvisionneurs, manufacturiers, planificateurs, prestataires logistiques, ...) subissent sont :

De l'autre, la volatilité des demandes des consommateurs :

Le développement et la pratique du processus DRP n'a malheureusement que modérer cette réalité.

Pour rappel, les principales données à connaître dans le cadre de ce processus sont :

Elles permettent une simulation des besoins en ressources dans le temps à savoir :

Partant d'une réalité stable dans le temps, celle du niveau rémanent, et semble-t-il incompressible des ruptures en linéaire, aux alentours de 8 à 9% du nombre des références présentes (aussi bien aux USA qu'en Europe), les recherches se sont développées pour le réduire dans le contexte qualifié ci-dessus.

Dans le cadre d'une Conférence organisée par la Chaire de Logistique des Professeurs ZIV et JOUENNE au CNAM, André J. MARTIN, spécialiste de l'intégration des chaînes de distribution et père concepteur du DRP, est venu présenter à la Communauté des Logisticiens et Experts de la Supply Chain son dernier concept dit de FLOWCASTING.

De quoi parle-t-on ?

Tout d'abord , du constat que 100% de ce qui devrait être « prévisionné » est calculé et que 100% de ce qui devrait être calculé est prévisionné.

Ensuite du constat que 97% des produits approvisionnés en points de vente le sont par leur propre réseau de distribution (autrement dit le réseau des plate-formes des distributeurs) et les méthodes de réapprovisionnement sont encore bien souvent disparates, basiques (le point de commande est encore largement pratiqué) et très éloignées de la variété des évènements se produisant sur un point de vente (ruptures, promotions, mise en avant, aspects de concurrence locale….).

Le résultat, malgré la mise en œuvre du DRP depuis une douzaine d'années, amène à constater la résistance de ce taux de ruptures en linéaire de l'ordre de 8 à 9% Aussi, fort de ce constat, dans un état d'esprit très innovant (think out of the box), et empreint d'une réflexion partagée avec Mr J ORLICKY sur le fait de ne jamais « prévoir ce que vous pouvez calculer », André J. MARTIN en a dégagé un nouveau paradigme dénommé FLOWCASTING qui repose sur une simple idée :

La planification des flux commence en point de vente et l'exécution des flux se termine en point de vente.

Toutes les actions et informations (que ce soit en calcul de prévision ou calculs de planification ) sont sujettes à enrichissement et révision par les acteurs de la chaîne Les premiers pilotes opérés sous la conduite de André J. MARTIN ont donné des résultats spectaculaires :

L'enjeu estimé de cette approche aux USA est de 600 milliards de dollars (soit 6% de 10,36 trillions de dollars).

Le message est donc clair : Don't forecast but flowcast !